N.B. Ce document en est à un stade avancé, mais il demeure une ébauche.. Il reste bien des recherches à faire ou à valider. Nous recueillons toujours des commentaires. Il nous faut encore peaufiner les transitions entre la part que nous faisons à la raison et celle que nous faisons à l'intuition.
Les dossiers de la série Le citoyen du Québec ont tous la même structure : Introduction, Principe, Renseignements pratiques, Illustrations, Enjeux, Jalons, Vigilance, Sources.
Principe : nous explicitons d’abord le principe.
Renseignements pratiques : il s’agit d’un court guide sur les services correspondant aux aspects de la vie publique : santé…
Illustrations : Personnes, événements, lieux, œuvres illustrant le principe.
Enjeux : le contexte parfois difficile auquel un principe s’applique
Jalons : étapes, actions significatives marquant le progrès dans le respect d’un principe.
Vigilance : esprit critique à scandales et autres événements troublants qui détournent la société du principe en cause
Sources : Livres, Revues, Sites, Articles, Vidéos, Audios sur un principe
L'appartenance c'est le lien vivant, l'enracinement. Nous appartenons à ce qui nous nourrit: un sol, un paysage, une patrie et ses symboles, une maison et les êtres chers qu'elle abrite, une culture et ses ponts vers le sens de la vie.
Nous sommes des plantes mobiles, nos sens sont nos racines; une fois qu'elles ont pénétré dans le paysage familier, elles s’y attachent et s’y enfoncent un peu plus chaque jour. Elles en tirent une sève de plus en plus riche et vivifiante. Livingstone fait état d’Africains qui mouraient aussitôt séparés de leur terre natale. Il semble incontestable que bien des gens sont morts de la mort de leur ville après le passage de l’ouragan Katrina sur la Nouvelle Orléans.1 Au Québec, à l’occasion du verglas de 1998, on a recueilli des témoignages attestant que des personnes étaient mortes de la mort de leurs arbres.
D’autres toutefois, plus nombreux peut-être, ce fut le cas des Acadiens déportés en 1755, sont heureux de trouver refuge sur une terre nouvelle, ayant été victimes d’injustices dans leur propre pays, preuve que sans justice, si vivants soient-ils, les sentiments d’appartenance ne sont jamais vraiment assurés. L’œuvre de Solon, l’auteur de la constitution athénienne, a consisté pour l’essentiel à rapatrier d’honnêtes paysans ayant été condamnés à l’exil par les grands propriétaires. Le sentiment d’appartenance n’existe dans sa plénitude que lorsque la Justice est au centre de ce qui nourrit l’être humain.
«J'ai ramené dans leurs foyers par Zeus bâtis
Les exilés, innocents ou non, engloutis
Dans le malheur, vendus, chassés ou bien partis
D'eux-mêmes et si longtemps errant à l'étranger
En proie à la misère, au malheur, au danger,
Qu'ils avaient oublié la langue de leurs pères!» Solon
En raison même de l’importance des racines, le nouveau venu dans un lieu est soumis à une adaptation souvent difficile. Qu'il veuille conserver son identité pendant un certain temps, la chose est normale à la condition qu'il consente d’abord à donner son énergie à ce lieu pour l’aider à évoluer selon sa loi interne. Les problèmes d’identité pour l’hôte et d’adaptation pour l’immigrant ne deviennent graves que lorsque le premier doute de son identité et que le second veut imposer la sienne avant même de donner son énergie à l’ensemble.
Ces choses n’arrivent toutefois que lorsque la vie a commencé à régresser dans un milieu. Il faut avant tout veiller sur cette vie. Il sera toujours temps de négocier le partage d’un espace purement fonctionnel.
Veiller sur la vie du Québec, c’est ce que propose madame Lise Payette au terme d’une réflexion sur la Commission d’enquête Charbonneau : «Quand nous aurons coupé les arbres qui privent la nature de l’air, de l’humidité et du soleil dont elle a besoin pour vivre, qu'aurons-nous à planter pour retrouver une forêt saine et solide?» Quels soins devrons-nous apporter au sol pour en régénérer l’humus. C’est la métaphore de l’humus qui illustre le mieux l’appartenance en tant que lien vivant.
La pollinisation est une autre belle image de l’appartenance. Dans une communauté humaine riche, la pollinisation est assurée par la multitude de ces brèves rencontres qui ponctuent la vie quotidienne: à la maison, au marché, au bureau de poste, à l'école, à l'église, au parc, dans la rue, à la librairie, au restaurant. Chaque fois qu'un de ces lieux disparaît, des liens d'appartenance se brisent.
Évoquant un jour de fête à Florence Lewis Mumford, penseur et historien de la cité vivante, écrit : « La vie s'épanouit dans cette dilatation des sens: sans elle, le battement du cœur est plus lent, le tonus musculaire plus faible, la prestance disparaît, les nuances de l'œil et du toucher s'estompent, il se peut même que la volonté de vivre soit atteinte. Affamer l'œil, l'oreille, la peau c'est courtiser la mort tout autant que de se priver de nourriture. [...] La maîtrise du langage ne compense pas la malnutrition des sens.» (Lewis Mumford, The culture of cities.)
Nous savons construire des gratte-ciel, des rues souterraines, des aéroports et des banlieues. Savons-nous donner vie à ces vastes ensembles ou prévenir la disparition de cette vie, là où elle existe? Bien peu d'auteurs ont traité ce sujet avec bonheur, car pour comprendre la vie, il faut la porter en soi et posséder une sensibilité qui permet d'être touché, parfois au milieu de la laideur, par ces signes irrécusables de la vie que sont des vêtements sur une corde à linge, des légumes sur une table et une porte noire au milieu d'un mur de brique rouge. À l'origine, dit Lewis Mumford, la ville était femme. Jane Jabobs a redécouvert cette origine.
« C’est quoi une ville ?... C’est, parmi d’autres choses, les cris stridents des enfants courant dans les rues, la clameur d’une foule vivante ; le boucher voisin chez qui la ménagère peut laisser la clé de sa maison ; l’épicerie du coin qui reste ouverte après minuit ; le serrurier et le cordonnier;...le vieil homme au regard fixe comme un portrait muet dans le cadre de sa fenêtre du premier étage… Qu’est-ce que les urbanistes ont mis à la place de tout cela ? Des projets pour ménages à faibles revenus qui 'deviennent des foyers de délinquance, de vandalisme et de désespoir général, pire que les bidonvilles'… Obsédés par les statistiques et les plans, les urbanistes et les promoteurs oublient de s’intéresser à ce que les gens qu’ils transplantent désirent réellement. »
Le sentiment d’appartenance peut exister à l’échelle d’un pays ou d’une nation. On appartient à un pays par le désir autant, sinon plus que par la raison. Il faut que le pays contienne dans sa constitution, ses symboles, ses grandes œuvres, une beauté qui éveille le désir et constitue une source d'inspiration. Les citoyens peuvent ainsi remplir leurs obligations avec cette philia, cette amitié qui liait entre eux les habitants d'une cité grecque.
Il existe aussi un sentiment d’appartenance à l’échelon local. Les hommes politiques québécois se sont rendus compte (avec surprise pour certains), il y a une décennie, lors de l’épisode des fusions à Montréal, de la force de l’attachement de beaucoup de citoyens à l’endroit de leur municipalité ou de leur quartier. Encore aujourd’hui, il est fréquent de voir la population d’une petite ville ou d’un village se mobiliser afin de sauver une école, une église voire une caisse populaire, car on estime qu’elles symbolisent l’identité de cette ville ou de ce village.
Toutes les formes de vie sont liées entre elles comme les éléments d’un écosystème. De sorte que lorsque la vie est attaquée dans une culture, elle se retire de toutes ses manifestations, des communautés et des écosystèmes aussi bien que des personnes et de leurs créations: maisons, villes, œuvres d’art, à l’instar de la mer qui, à marée descendante, se retire uniformément de toutes les baies. Le retour de la vie ne peut s’opérer que de la même manière, simultanément dans toutes les manifestions de la vie.
Mais ce retour de la vie, nous ne pouvons pas l’assurer par les moyens d’ordre technique qui ont justement eu pour effet de l’éloigner. La vie ne peut naître que de la vie, loi qui s’applique à toutes les formes de vie, y compris à celle des symboles, ce que Goethe2 avait compris: «Seule la vie peut donner la vie. L’intelligence peut façonner, mais étant morte, elle ne peut donner une âme. De la vie seulement peut jaillir le vivant».
1- The Storm, par Ivor van Heerden et Mike Bryan, Penguin Book, 2007.
« L'enracinement, écrit la philosophe Simone Weil, est peut-être le besoin le plus important et le plus méconnu de l'âme humaine. C'est un des plus difficiles à définir. Un être humain a une racine par sa participation réelle, active et naturelle à l'existence d'une collectivité qui conserve vivants certains trésors du passé et certains pressentiments d'avenir. Participation naturelle, c'est-à-dire amenée par le lieu, la naissance, la profession, l'entourage. Chaque être humain a besoin d'avoir de multiples racines. Il a besoin de recevoir la presque totalité de sa vie morale, intellectuelle, spirituelle, par l'intermédiaire des milieux dont il fait naturellement partie. »
LES SENTIERS DE LA VIE
L'éthologiste Konrad Lorenz avait la fâcheuse habitude d'arriver toujours en retard à ses cours de l'Institut Max Planck de Munich en Allemagne. Il faisait le trajet à pied, un trajet rempli d'imprévus et d'occasions de s'arrêter. Pour l'aider à se discipliner, ses étudiants ont, à l'aide d'une carte de la ville, tracé le trajet le plus court, sans se soucier de l'aménité des rues empruntées pour cette opération rationnelle. Le maître se plia à cette règle pendant quelques jours. Il arriva toujours à l'heure, mais dans une humeur telle que ses étudiants eurent bientôt la nostalgie du passé, comprenant que le temps perdu par rapport à l'horaire était de l'humanité retrouvée, pour eux comme pour lui. Le trajet habituel de Lorenz était ponctué de points d'humanité, de boutiques ouvertes sur la rue où une boulangère, un boucher, un cordonnier, une fleuriste élevaient leurs regards et leur pensée, pour saluer en Konrad Lorenz un représentant de l'humanité.
UNE CHAISE CHINOISE INDÉRACINABLE
Dans les années 1980, après la construction du complexe Guy-Favreau, au cœur du quartier chinois à Montréal, on racontait que de vieux Chinois, dont la maison avait été rasée durant les travaux d’édification du nouveau centre, s’asseyaient à l’intérieur de celui-ci, à l’endroit même où avait dû être leur demeure… Je ne sais si cette histoire est vraie. Elle marque bien l’attachement que l’on peut avoir pour le lieu où l’on vit, qui porte nos souvenirs, nos rêves et nos espoirs. Fabrice Larceneux, du CNRS, rappelle l’importance du logement du point de vue de l’identité de la personne : « Plus fondamentalement encore (…), le logement n'a pas qu'une fonction d'abri mais [il a] davantage [celle] de permettre à chacun d’exprimer son individualité, la capacité à se sentir chez soi, à créer une relation particulière entre un lieu et une identité. (…) Le logement est le lieu de la prise de conscience de soi qui permet de se stabiliser, se ressourcer pour mieux s’ouvrir au monde plus tard.» (1)
LE DEUIL DES NÉVONS
Un pas de jeune fille
A caressé l’allée,
A traversé la grille.
Dans le parc des
Névons
Les sauterelles dorment.
Gelée blanche et grêlons
Introduisent l’automne…
Ce sentiment d’appartenance à une maison, c’est souvent lors de la mort du chef de famille que l’on en prend conscience. Certains des héritiers souhaitent alors conserver le lieu qui les a vus naître et grandir, alors que d’autres veulent en retirer au plus vite une coquette somme. Le poète français René Char a écrit un poème intitulé « Le Deuil des Névons » , à la suite de la perte de la maison familiale des Névons, en Isle-sur-la-Sorgue, qui a nourri une partie de son œuvre. Après la mort de sa mère, sa sœur aînée et lui-même souhaitaient conserver le lieu intact alors que leurs deux autres frère et sœur voulaient au contraire se départir de la maison et de son parc. L’affaire devait aller devant les tribunaux, qui ont tranché en faveur de la vente aux enchères du domaine. La conclusion de cette histoire fut malheureuse : « René Char et sa sœur Julia ne peuvent réunir la somme nécessaire au rachat du domaine qui est attribué à l’Office HLM. Albert et Émilienne rachètent la maison seule, sans le parc, mais laissée à l’abandon, elle ne tarde pas à devenir ruine. L’Office HLM recouvre le cours d’eau éponyme des Névons, abat les arbres du parc et construit en lieu et place un ensemble d’immeubles. » (2) C’est cette tragédie, du point de vue de l’écrivain, que le poème entend exorciser. Une tragédie que vivent, avec plus moins d’intensité, bien des familles.
Le Plateau Mont-Royal sur le site Les places publiques du monde
Yves Beauchemin, auteur du roman Le matou, peut se flatter d'avoir transformé en symbole universel d'appartenance un restaurant bien réel de Montréal, la Binerie.
En plus de servir un pâté chinois de premier ordre à sa clientèle de milieu populaire, cette excellente maison devint le refuge adoré d'un enfant appelé Émile. […] La Binerie fut pour l’enfant de la rue un lieu d’appartenance d’autant plus inattendu et fort qu’il comblera à la fois son appétit de mal nourri et surtout, son besoin d’être reconnu, d’être aimé et d’aimer. Mais comme tout être malheureux, c’est progressivement qu’il pourra s’abandonner à cet amour. « Un matin, monsieur Émile, sérieux comme un notaire, vint trouver (Florent) dans sa chambre – J’ai quelque chose à te dire (…) Il fit quelques pas et posa sa main sur la couverture – C’est à cause de moi que t’es malade, hein? lança l’enfant avec un air de défi. Florent fronça le sourcil, étonné – (…) C’est parce que je cours dans le restaurant et parce que je fais jouer la tévé trop fort et que je fais trop de bruit avec mes pieds quand je vais faire pipi la nuit, hein?. Sa voix s’était mise à trembler. Encore un peu, et les larmes allaient jaillir. Florent le saisit par le bras – Veux-tu bien me dire qui t’a fourré ces folies-là dans la tête? s’exclama-t-il en riant. Je suis malade parce que j’ai trop travaillé, c’est tout. Et je suis content que tu restes avec nous, même si j’aurais envie des fois de te chauffer les fesses. Le visage du petit garçon se rasséréna un peu, mais son regard restait méfiant : – Ma mère… ma mère dit qu’il y a des gens qui ne peuvent pas endurer les enfants, parce que ça les tue… Florent se remit à rire et lui ébouriffa les cheveux : – C’est vrai, il y en a. En tout cas, nous autres, on t’aime bien et on n’a pas du tout envie de te renvoyer. Et puis, je vais déjà mieux, ça ne paraît pas? Dans deux jours, je vais aller te retrouver au restaurant. Monsieur Émile ne put en supporter davantage. Il sortit à la course et déversa le trop-plein de son émotion dans la cour en frappant contre une poubelle avec un vieux chariot de machine à écrire.»
Pour bien vivre au Québec, il faut, comme partout ailleurs, y rechercher les points de vie – il s’agit souvent de places publiques, mais parfois aussi d’une simple ruelle fleurie, d’une vieille église dominant le fleuve, d’une boulangerie à Kamouraska, d’un quai à North Hatley.
Même si le sentiment d’appartenance est un lien vivant, il ne peut se développer qu'’à la suite d’un processus juridique conduisant à la citoyenneté. Il existe deux services d'immigration, l'un à l’échelon québécois, l'autre au niveau fédéral canadien. Le Québec a obtenu le droit de sélectionner les immigrants qu’il souhaite accueillir, en privilégiant les francophones. Afin d’exercer ce droit, des bureaux d'immigration ont été établis en divers coins du monde. Le candidat peut aussi entamer une démarche d’immigration en s’adressant directement à l’ambassade canadienne dans son pays
On appartient d’autant plus à un lieu qu'on y est propriétaire de sa maison. Hélas! Au Québec une maison coûte dix fois plus cher aujourd’hui qu'elle ne coûtait en 1963 tandis que, par exemple, les billets d’avion sont toujours au même prix. Faut-il voir là une invitation au voyage et un obstacle à l’appartenance, un effet de la mondialisation? Pour devenir propriétaire, mieux vaut pour la moitié la plus pauvre de la population s’initier à l’auto-construction, s’associer à d’autres en coopératives ou selon d’autres formules, rechercher les endroits où les maisons et les terrains coûtent le moins cher. Mais attention : c’est dans certaines régions éloignées connaissant un développement économique accéléré, Sept-Îles par exemple, que le prix des logements et donc de la propriété a le plus augmenté.
Dans d’autres régions éloignées appartenant au vaste domaine public du Québec (75 % du territoire), on peut louer pour 100 ans, à bas prix, un terrain près de l’un de ces grands lacs situé au nord de Saint-Michel-des-Saints ou de La Tuque. Plusieurs s’associent à des parents ou des amis pour y construire un chalet où l’on ne se rendra que quelques fois par année, en avion ou par des chemins forestiers, mais avec la certitude d’y trouver une nature vraiment sauvage et la joie d’avoir des racines au cœur de la grande forêt boréale québécoise. Pour en savoir plus, on peut s’informer auprès du ministère des Ressources naturelles qui est responsable de la location et de la vente de ces terrains.
Les Québécois préfèrent montrer leur nature plutôt que leurs maisons. Vous voulez découvrir le vrai visage de l’architecture québécoise : fermez les yeux sur les maisons offertes à la vue de tous le long des routes et des boulevards achalandées, et regardez celles qu'ils cachent près de leurs lacs, de leurs rivières et de leur fleuve…ou au cœur de leurs villages historiques. Si vous cherchez l’équilibre entre l’appartenance à la nature et l’appartenance à une communauté, vous aurez intérêt à prendre la direction des lacs, des rivières et du fleuve. Sachez cependant que pour aménager votre propriété, près d’un lac en particulier, vous devrez suivre des règles strictes.
Les rives, le littoral et les plaines inondables sont essentiels, la science nous le dit, à la survie des composantes écologiques et biologiques des cours d’eau et des lacs. Des politiques, des lois et des règlements, tant nationaux que municipaux, balisent donc les interventions auxquelles peuvent procéder les propriétaires de terres riveraines. On peut en apprendre plus en se rendant sur le site du ministère du Développement durable, de l'Environnement, de la Faune et des Parcs.
J’habite une maison ancienne. Puis-je espérer qu’elle soit protégée pour les générations futures? Oui. Mais une démarche particulière s’impose. Au Québec, l’État joue un rôle actif en matière de protection du patrimoine. Si votre résidence est reconnue officiellement comme bien patrimonial, vous êtes soumis à certaines obligations.
Certains ont cru voir dans l’avènement des nouvelles technologies de l’information et de la communication une panacée à la disparition des liens vivants. Si les lieux réels d’appartenance disparaissent, peut-être des lieux virtuels pourront-ils prendre le relais. L’expression « communauté virtuelle » devient à la mode. Mais cela suffit-il à combler le besoin d’appartenance des individus?
Dans un sondage Léger Marketing commandé en 2011 par Hebdos Québec, on apprend que, de tous les Québécois, ce sont les jeunes, ceux donc qui sont le plus à l’aise avec les NTIC, qui avouent se sentir les plus seuls (à 23 %). Une majorité des répondants au même sondage (40%) estime par ailleurs que le fait de passer beaucoup de temps sur internet contribue à les isoler de leur entourage (1).
(1) « La maladie mentale et la solitude préoccupent les Québécois », Agence QMI, 2 octobre 2011.
Si, dans la société québécoise traditionnelle d’avant 1960, les assignations d’origine, les liens donnés, par la famille, la religion, le voisinage, le monde du travail, etc., avec leur part de contrainte mais aussi leur caractère rassurant, étaient à la base des rapports sociaux, aujourd’hui, ce sont plutôt les liens choisis qui sont la règle, et ce dans toutes les sphères de la vie de l’individu. Ce sociologue résume assez bien la façon commune de voir de notre époque : « L’appartenance, fût-elle tenue pour constitutive de l’identité ou de la personnalité de l’individu, ne se présente pas d’abord comme un héritage qu’il y aurait à recevoir tel quel ou, dans le meilleur des cas, à faire fructifier. C’est un héritage dont on peut disposer. Que l’on peut protéger, conserver, vénérer, mais aussi que l’on peut investir et utiliser à d’autres fins que sa propre reproduction, que l’on peut agencer, transformer, maquiller, dilapider ou récuser. » (1) Une telle conception de l’appartenance, très exigeante pour l’individu, crée une plus grande instabilité que les ancrages traditionnels. D'où ce sentiment de solitude de plus en plus répandu que nous avons évoqué plus haut.(1) A venir.
Pour un individu, la richesse des liens d’appartenance est assurément un facteur de bonne santé et d’équilibre mental. Les études médicales le démontrent : l’être humain, pour se développer harmonieusement, a besoin d’établir avec ses semblables des relations constructives et significatives. Ces interactions doivent également être suffisamment nombreuses et variées. Inversement, la personne dont les liens sociaux ont été rompus peut éprouver un sentiment de détresse. C’est particulièrement vrai des individus dont l’intégration sociale est limitée par l’extrême pauvreté et la misère. Le sondage mentionné plus haut révèle (1) que c’est dans la région de Montréal que les gens se sentent le plus seuls au Québec (18% des répondants), alors que la moyenne québécoise est de 15%. Et, dans la métropole, le quartier où l’on retrouve le taux le plus élevé est Hochelaga-Maisonneuve (27%), un des secteurs les plus économiquement défavorisés de la ville. On comprend donc pourquoi la lutte contre la misère dépasse le seul enjeu économique. Une société peut-elle croître et être prospère, à long terme, en laissant de côté une part importante de sa population, qui n’a envers elle qu’un sentiment d’appartenance ténu? L’existence de cette réalité doit interpeller nos élites politiques et économiques, alors que s’accroît année après année l’écart entre les mieux nantis et les plus pauvres dans notre société.
(1) « La maladie mentale et la solitude préoccupent les Québécois », Agence QMI, 2 octobre 2011.
On constate aujourd’hui un brouillage fréquent entre le privé et le public au sein d’espaces qui étaient autrefois réellement publics. Ainsi, il n’est pas rare de voir tel ou tel restaurant, en élargissant sa terrasse, empiéter sur le trottoir ou la rue. Et ce, avec la bénédiction des autorités municipales. De même, certaines rues réputées commerciales sont régulièrement fermées à la circulation automobile afin que s’y tiennent des ventes de trottoir. Parfois, c’est tout un quartier qui est réquisitionné par les organisateurs d’un festival, avec guichets payants à l’entrée.
Dans les villes de banlieue, ou dans les petites villes, c’est le plus souvent le centre commercial qui tient lieu de place publique. Mais, comme le rappelle fort justement Perla Korosec-Serfaty, « Ces espaces, quoiqu'en apparence 'publics', vident les rues avoisinantes de leurs usagers, mais ne sont gérés qu'en fonction d'un but unique, de nature commerciale (…). Ils ont leur police privée qui en règle les usages. Certaines pratiques ludiques récentes y sont organisées par les propriétaires, ou tolérées après obtention de leur accord (…), alors que d'autres pratiques traditionnelles associées aux territoires collectifs, comme les rassemblements spontanés ou organisés dans un but récréatif ou politique, y sont interdites. En d'autres termes, en dépit d'une image publique d'ouverture et d'accessibilité sans limites, ces espaces sont physiquement ('objectivement') clos et socialement sélectifs. » (1)
(1) « La sociabilité publique et ses territoires - Places et espaces publics urbains », Arch. 8 Comport. I Arch. Behav., vol. 4, no 2, p. 111-132 (1988).
On peut dire que, depuis les années 1960, le patrimoine est quelque peu malmené au Québec. Pour édifier la Montréal du maire Drapeau, il a fallu raser des quartiers entiers et bien des monuments sont passés sous le pic des démolisseurs. Alors que se produisaient ces destructions, une conscience plus grande de la valeur du passé, et en particulier du passé tel qu’il s’incarne dans des bâtiments privés et publics, a commencé à se développer au sein de notre société. Le gouvernement québécois s’est mis à jouer un rôle plus actif, des lois ont été adoptées (voir plus loin). Des groupes de pression voués à la défense du patrimoine (Héritage Montréal, etc.), des sociétés d’histoire sont apparues au-devant de la scène et ont commencé à sensibiliser la population aux enjeux patrimoniaux. Mais leur combat fut toujours difficile, face au rouleau compresseur du développement. La conjoncture est peut-être encore plus dure aujourd’hui, alors que l’État se désengage de bon nombre de ses missions pour raison de déficit. La rapacité des promoteurs de tout acabit peut alors se déployer presque sans gêne, la plupart du temps avec l’aval des autorités en place, gouvernementales ou municipales, au nom du nouveau dogme de la création de la richesse.
Cela étant dit, force est de reconnaître, au-delà du mercantilisme manifesté par certains, qu’il existe une tension difficile à résoudre entre la protection du patrimoine et le nécessaire développement des villes. S’il faut assurément être vigilant et veiller à ce qu’on préserve certains bâtiments ou monuments chargés de sens, on ne peut tout conserver, car alors on ne laisse plus de place au présent et à l’avenir, car alors on se fige dans un passé de pierre. Il ne faut pas oublier que les beaux édifices du passé que nous admirons aujourd’hui ont été un jour des construction du présent, et qu’il nous faut, dès aujourd’hui, nous préparer à ajouter au patrimoine de demain.
Auteur de films d'animation de réputation internationale, Québécois d’origine alsacienne, Frédéric Back est récipiendaire de deux Oscars pour ses films Crac! et L'homme qui plantait des arbres, ce dernier inspiré de la nouvelle de Jean Giono.
On peut certes le présenter comme un artiste engagé, dans le sens noble du terme, puisqu’il n’a jamais hésité à mettre son talent à la défense des valeurs qui lui sont chères — la sauvegarde du patrimoine et de la mémoire collective, et la défense de l'environnement — un art rempli d'une immense sollicitude pour le monde qui nous entoure, un art humble mais parfaitement maîtrisé.
Sa préoccupation pour la mémoire, c’est dans son film CRAC! (1981) qu’elle va se manifester avec éloquence. Le film raconte l’histoire d’une chaise berçante et de la vie qui gravite autour de cet objet… vivant. Il s’agit en fait d’une allégorie sur l’industrialisation rapide du Québec. « Dans cette jolie fable un brin nostalgique, Frédéric Back fait revivre des tranches savoureuses de la vie traditionnelle mise à l'écart par les sirènes du progrès et une urbanisation galopante. » (1)
En 1993, dans Le fleuve aux grandes eaux, il s’attache à l'histoire du fleuve Saint-Laurent pour « ‘mettre en évidence sa splendeur, comme la dimension de l'exploitation insensée dont il a été victime’. C'est à la fois un cri de détresse et un message d'espoir : devant ‘le drame universel de l'eau‘, chacun de nous a le pouvoir de cesser le gaspillage, de poser des gestes concrets pour voir renaître les flots providentiels.» (2) Cette préoccupation pour l’eau, « source de vie, de beauté et d’espoir » a amené Frédéric Back à militer au sein d'organismes tels que la Coalition Eau-secours, la Fondation Rivière et la Société Sea Shepherd.
Céline Dion, symbole de la famille traditionnelle du Québec
En dépit de son statut de star internationale, Céline Dion, « la petite fille de Charlemagne », a toujours su garder un lien très fort avec le Québec. Beaucoup de gens se reconnaissent en elle. Ce qui les touche, assurément, c’est le lien vivant qu’elle a su conserver avec son milieu d’origine, avec sa famille. Elle le rappelle constamment dans ses entrevues : la vie de famille est essentielle pour elle. Elle n’est pas de ces « retours de l’étranger » (comme il y avait, autrefois, les « retours d’Europe », dixit le journaliste André Laurendeau) qui regardent avec hauteur le bon peuple arriéré.
Pour l’historien Frédéric Demers, qui signait il y a quelques années un essai sur Céline Dion et l’identité québécoise, celle-ci symbolise bien le «nouvel Être québécois », fait d’attachement au passé et d’ouverture au monde: « Par ses origines modestes, son discours enraciné localement et les nombreux rappels de son appartenance à une certaine forme de québécitude, Céline Dion est restée fidèle à la terre, à la famille, à une définition traditionnelle de l’identité. Parallèlement, elle participe à sa redéfinition en symbolisant un Québec moderne, audacieux et fort, capable de rivaliser avec ces Autres par rapport auxquels la majorité se définit : Canadiens anglais, Américains et Français. En somme, Céline Dion apparaît tout à la fois comme un lieu de mémoire et un horizon d’attente pour la collectivité québécoise. »
Le Castor africain : Boucar Diouf
Depuis son arrivée à Rimouski en 1991, l’humoriste d’origine sénégalaise Boucar Diouf a développé un amour profond pour le Québec. Les sociologues pourraient voir en lui l’exemple d’une intégration réussie à la société d’ici. Biologiste de formation, il a fait une thèse de doctorat en océanographie à l’Université du Québec à Rimouski sur l’adaptation des éperlans au froid. Une formation de haut niveau et un réel souci pour la qualité de la langue, voilà qui n’est pas fréquent chez les membres de sa profession dont l’absence de maîtrise du français laisse souvent songeur.
Dans ses spectacles d’humour et dans les quelques livres qu’il a publiés (Sous l’arbre à palabres, mon grand-père disait…, 2007; La Commission Boucar pour un raccommodement raisonnable, 2008), il poursuit une réflexion, émaillée de fables, de contes, d’anecdotes de son Afrique d’origine et d’ici, sur l’identité, l’immigration, la rencontre avec l’autre, sur ce qui, en somme, cimente une société pluraliste. Dans une lettre ouverte il écrit : « On ne peut pas devenir l'autre sans l'approcher, l'écouter, lui parler, le sentir, l'aimer et surtout l'étudier avec passion. S'intégrer à une nouvelle culture, c'est comme lire un livre plusieurs fois. La première lecture sert généralement à se familiariser avec les personnages. À la deuxième lecture, on s'intéresse davantage à l'histoire. Mais après la troisième lecture, si on arrive à raconter cette histoire avec passion, c'est qu'elle est aussi devenue la nôtre et les personnages, des membres de notre propre famille. » Le castor est une allégorie à laquelle il recourt fréquemment. «La laïcité, c'est comme un barrage de castors. Dès qu'il y a une brèche, tout fout le camp!», lance-t-il dans un de ses spectacles. En un autre sens, il compare souvent le combat des Québécois francophones contre l’assimilation à l’édification d’un barrage de castor. Pour lui, « (…) le rapport d'identité est un rapport de force. Il faut affirmer notre identité, et si on la perd, la société disparaît. » (1) Ce rapport de force, c’est à travers le barrage qu’il s’établit. Laissons-lui le mot de la fin : « Si être Québécois, c'est aimer le Québec et y vivre, je suis une pure laine vierge de mouton noir. Et j'exprime ma gratitude envers cette nation qui m'a accepté, et envers ses citoyens qui me considèrent comme un des leurs. » (2)
(1) Boucar Diouf et le barrage de castor québécois, émission « Médium large », Radio-Canada, 23 janvier 2013.
(2) Boucar Diouf passe aux aveux, Elle Québec (http://www.ellequebec.com/societe/boucar-diouf-passe-aux-aveux/a/26445).
Le fleuve saint Laurent
Ode au Saint-Laurent de Gatien Lapointe
Ma langue est d'Amérique
Je suis né de ce paysage
J'ai pris souffle dans le limon du fleuve
Je suis la terre et je suis la parole
Le soleil se lève à la plante de mes pieds
Le soleil s'endort sous ma tête
Mes bras sont deux océans le long de mon corps
Le monde entier vient frapper à mes flancs
LA FROMAGERIE LA STATION
Symbole du développement de l’art culinaire au Québec, cette fromagerie, récipiendaire de plusieurs grands prix, canadiens et québécois est aussi un symbole de l’appartenance, à un paysage, cette vallée de la rivière Coaticook que décrit Léon Gérin, à une tradition architecturale, les granges et la fromagerie forment un ensemble remarquable et à une tradition familiale : alors qu'il y a des problèmes de succession dans de nombreuses fermes du Québec, ici les trois fils des propriétaires, participent à l’aventure qui perpétue l’œuvre du grand père.
Le paysage : «Ce sont de grandes ondulations verdoyantes ou dénudées, arides parfois, portant une forêt plus ou moins entamée, où s'entremêlent la clairière, la savane, la prairie, le frais vallon où s'épanche une source, où gambade à l'occasion un chevreuil, en compagnie peut-être d'une génisse ou d'un bouvillon échappé de la ferme voisine, à la lisière d'un champ cultivé où déjà pointe la céréale ou la graminée.» Léon Gérin, Le type économique et social des Canadiens français.
Une église sauvée et transformée par une petite communauté de l’Estrie
Face à la menace qui pesait sur son église paroissiale, le village de Saint-Camille, à 35 km au nord-est de Sherbrooke, a pris les choses en main. Il faut dire que la Fabrique, propriétaire des lieux, envisageait le futur avec pessimisme, étant donné la baisse marquée du nombre de pratiquants réguliers et les importantes rénovations à faire dans les années à venir pour conserver en l’état le bâtiment. Comme il ne s’agissait pas d’une église exceptionnelle du point de vue architectural ou historique, elle ne se qualifiait donc pas pour les programmes de subvention du patrimoine religieux. Les autorités municipales amorcèrent en 2006 une démarche de réflexion, qui impliqua tous les citoyens du village. Un projet en résulta : après la vente de l’église à la municipalité, celle-ci serait transformée pour en faire un espace multifonctionnel et multi générationnel répondant aux besoins de la communauté. Lors d’une consultation, la population du village exprima les besoins suivants quant au nouvel espace : 1) y poursuivre l’organisation de célébrations religieuses; 2) doter les élèves de l'école d’un gymnase et d'un espace scénique pour des spectacles (théâtre, musique, etc.) ; 3) offrir des locaux plus adéquats aux organismes communautaire du village; 4) aménager une pièce destinée aux activités d’artisanat (métiers à tisser, etc.) ; 5) intégrer au projet une salle pouvant accueillir plus de 200 personnes pour diverses manifestations (funérailles, colloques, spectacles, fêtes familiales). Il fallait bien sûr préserver l’élément central de l’ensemble architectural et respecter la capacité financière de la population. En 2012, la municipalité a pu présenter à la population des esquisses architecturales de l’ensemble projeté. Le projet suit son cours. Cette belle histoire a fait l’objet d’un film en 2011, réalisé par Bruno Boulianne : « Ne touchez pas à mon église ».
Le plus intéressant, dans la démarche mise en œuvre à Saint-Camille, c’est que la rénovation de l’église n’y est pas vue comme une tâche qui incombe aux seuls catholiques. Non, ce projet est vu, par la municipalité, comme concernant tous les citoyens de celle-ci. Sur le site Web du village, on peut lire en effet que les nouveaux aménagements « amélioreront de façon importante l'offre de services à Saint?Camille, et ce pour l’ensemble de la communauté ». Ce n’est pas non plus un projet qui vise à sauver un bâtiment en tant que bâtiment, pour sa seule valeur architecturale, patrimoniale ou symbolique. La destination religieuse de l’édifice rénové, tel qu’on l’a vu plus haut, n’est pas escamotée, dissimulée de manière presque honteuse. Voilà un exemple à suivre dans d’autres villes et villages du Québec. Une manière très pertinente d’unir l’héritage catholique et le service à la communauté dans le contexte de la modernité.
Le nouveau parc-nature du Bois-de-Saraguay, à Montréal
Que voilà une heureuse initiative de nos gouvernements! Dans un milieu naturel menacé depuis plusieurs décennies, où se trouve la forêt la plus ancienne et la plus belle de Montréal, un parc de 97 hectares sera aménagé. Le parc-nature du Bois-de-Saraguay, au nord de l’île, sera en effet accessible au public dès l'été 2013. La Ville de Montréal y établira des sentiers, des haltes, des observatoires et des points d'accès à la rivière des Prairies.
Dix places publiques de Montréal
Le mont Royal, la Grand Bibliothèque, le canal Lachine et sa piste cyclable, le bord de l’eau Verdun-Lasalle, le parc Lafontaine, le marché Jean-Talon, le quartier des spectacles, la Main, la Place Jean-Paul Riopelle (1) –
La Grande Bibliothèque du Québec
Dix points de vie au Québec
La Terrasse Dufferin et le château Frontenac
La Terrasse Dufferin à Québec, le quai de Matane, un soir de pêche, l’île d’Orléans au mois de juin, Way’Mills en Estrie, les jardins de Métis, les îles Mingan, le Mont Orford, les fjords du Saguenay, la Baie James.
Le couvent des Ursulines de Québec
Le couvent des Ursulines, - la chapelle et les dépendances qui le prolongent, - est l'un des lieux les plus inspirants, les plus inspirés de la vieille ville de Québec, et sans doute d'Amérique. Cette beauté, c'est le reflet de ses origines. Depuis les débuts de la Nouvelle-France, la communauté des Ursulines, vouée à l’éducation des jeunes filles tant françaises qu’amérindiennes, est associée à la vie de Québec et de l’Amérique française. C’est Marie de l’Incarnation, une religieuse française de Tours, qui l’établit très tôt à Québec (1639). Il ne reste rien aujourd’hui des deux premiers monastères en bois (1641-1650 et 1651-1686). Toutefois, trois ailes en pierre construites à la fin du 17e siècle subsistent toujours. Il s’agit de l’ensemble de vestiges architecturaux des années 1670-1720 le plus important au Canada. Le retable de la chapelle est un chef-d’œuvre, sculpté par les Levasseur vers 1730. En 1972, la Commission des lieux et monuments historiques du Canada désignait le couvent des Ursulines comme lieu d’importance historique nationale en raison de la beauté de son architecture et de sa valeur historique.Source : Wiki Commons http://commons.wikimedia.org/wiki/File:Ursulines_Quebec_30.jpg
Le Parc botanique À Fleur d'eau (Rouyn-Noranda)
Fleur de macadam, dit-on à Montréal. Fleur d’or, pourrait-on dire dans cette région minière qu’est l’Abitibi… Le Parc botanique À Fleur d’eau, situé en plein centre-ville de Rouyn-Noranda, à proximité du lac Édouard, est assurément un des hauts lieux de cette ville du Nord. La publicité touristique de celle-ci lui fait d’ailleurs une bonne place parmi les principales attractions. Mais ce jardin est bien plus que cela. Sa création est le résultat d’une initiative d’un groupe de citoyens. Il participe de l’identité même de la ville.
Le citadin ou le touriste peut y trouver un peu de paix au milieu des quelque 25 000 plantes, arbres et arbustes qu’on y a mis en terre, ou en empruntant l’un des nombreux sentiers qui le serpentent ou la promenade de bois qui ceinture le lac Édouard. Un jardin alpin y fut aménagé, de même qu’un jardin géologique, où le visiteur peut en apprendre plus sur le développement minier de la région. Plus qu’un site touristique, ce parc est devenu au fil des ans une véritable école où jeunes et moins jeunes se sensibilisent à la nature abitibienne dans un cadre de détente. La faune n’a pas été oubliée, puisqu’on a établi des zones réservées à la nidification de diverses espèces d’oiseaux. Il est même possible pour une personne, un groupe ou une entreprise, d’y « parrainer » un arbre que l’on plantera et au pied duquel sera apposé un petit écriteau, avec le nom d’une personne ou un message particulier. Bien des gens le font afin d’honorer la mémoire d’un défunt. Mais d’autres veulent tout simplement souligner un anniversaire de mariage, une naissance ou baptême. Un manière d’inscrire la vie dans la Vie.
La création du Parc botanique résulte de l’implication d’un groupe de citoyens à l’initiative de Mme Julienne Mercier Cliche et de son mari, groupe qui a rendu possible le nettoyage puis la mise en valeur du site du lac Édouard, transformé en marais en raison d’activités industrielles et commerciales. Sur un site Web de la ville de Rouyn-Noranda, on peut lire l’éloge qui suit de ces citoyens dynamiques : « L’implication des gens du milieu, étudiants, citoyens adultes et personnes âgées, dans toutes les phases de la réalisation et dans l’entretien du parc botanique est véritablement remarquable. »n © Zorion, CC-BY-SA, Wikimedia Commons. On peut en apprendre plus en lisant : Julienne Mercier Cliche, La naissance d'un jardin nordique - « À fleur d'eau » inc. Récit vécu - Environnement, Fondation littéraire Fleur de Lys, Lévis, Québec, 2012, 342 pages, format Lettre (8.5 X 11 pouces), illustré. ISBN 978-2-89612-416-9 Source : http://latraversee.uqam.ca/flaneur_parcs1?page=2
Le travail accompli par la Fondation des Rivières pour la protection de la rivière la Romaine
La Fondation Rivières, fondée en 2002 par le comédien Roy Dupuis, a pour mission « d’œuvrer à la préservation, la restauration et la mise en valeur du caractère naturel des rivières – tout autant que de la qualité de l’eau ».
La rivière Romaine, près de Havre-St-Pierre, Québec
Cette fondation a joué un rôle de premier plan dans la lutte contre le projet de construction de centrales hydroélectriques sur la rivière La Romaine (Basse Côte-Nord). Rivière à saumon d’une longueur de près de 500 kilomètres, celle-ci traverse une portion particulièrement riche en biodiversité de la forêt boréale. Hydro-Québec est à y bâtir, depuis 2009, un complexe de quatre barrages dont les travaux dureront jusqu'en 2020. La mise en service d'une première centrale ne se ferait toutefois pas avant 2014.Tout en insistant sur les conséquences désastreuses de ce projet sur le plan environnemental, la Fondation Rivières et les autres organismes s’opposant à la société d’État soulignent, études à l’appui, que le projet ne sera pas rentable et que l’énergie produite sera vendue à perte. Ils sont d’avis que le gouvernement québécois devrait investir dans la conservation et l’efficacité énergétiques et les formes d’énergies renouvelables, plutôt que de recourir à un modèle de développement, à leur avis dépassé : l’hydroélectricité. Ils rappellent que, depuis 1960, 13 parmi les 16 plus grandes rivières du Québec ont été affectées ou modifiées par des projets hydroélectriques. Pour la Fondation et ses membres, il faut à tout prix veiller à la préservation des quelques grandes rivières sauvages qui restent encore intactes, car elles font partie de notre patrimoine naturel. Auteur : Guillaume Cattiaux
INITIATIVES HEUREUSES
Une maison faite de conteneurs maritimes recyclés
Quel objet symbolise mieux que le conteneur en métal la mondialisation nomade et commerçante ! Ces dernières années, à travers le monde, des architectes ont commencé à intégrer des conteneurs recyclés dans la construction d’habitations. Au Québec, c’est l'architecte Pierre Morency qui a été le premier à le faire, lors de l’édification de sa résidence secondaire, au bord du lac Aylmer. Le prix Marcel-Parizeau 2007 de l'Ordre des architectes du Québec lui a d’ailleurs été décerné pour ce projet.
Un autre architecte québécois, Bernard Morin, se montre très actif dans ce type de construction. L’entreprise qu’il a fondée, Maison Idékit, propose à un large public une architecture modulaire préfabriquée à partir de conteneurs qui s’assemblent comme des Lego grandeur nature (1) .
Tout récemment, il a poussé cette expérience plus loin encore, en créant un nouveau concept de constructions à partir de conteneurs : les capsules EM2, qui s’emboîtent les unes aux autres, verticalement ou horizontalement.
Précisions que ce type d’habitations modulaires est aussi approprié à un usage collectif. Par exemple, à Amsterdam, les étudiants et les assistés sociaux peuvent, pour un loyer raisonnable, loger dans des logis-conteneurs de 24 mètres carrés.
(1) Voir le site internet de l’entreprise : http://em2espacemobile.com/index.html Voir aussi : Carole Thibaudeau, Sept conteneurs, une maison, La Presse, 11 juillet 2008 http://maison.lapresse.ca/architecture/200807/07/01-872352-sept-conteneu...)
Que peuvent faire cinq individus idéalistes, débrouillards et compétents, avec 15 000 $ en poche, s’ils se lancent le défi de construire, ensemble, une maison à partir de matériaux provenant des rebuts? De bien belles choses. Leur expérience fut relatée, durant 13 semaines, en 2004-2005, dans une série télé intitulée, bien évidemment, « Les Artisans du rebut global » (Télé-Québec). Jacques Languirand, en tant que « philosophe espiègle », a apporté son concours à l’entreprise, en se posant comme que narrateur et témoin discret de cette expérience unique. Au terme de leur aventure, les « Artisans » ont achevé cette maison « recyclée » dont ils rêvaient. Celle-ci, bâtie au sommet du mont Arthabaska, dans les Bois-Francs, surplombe la région environnante. Telle un phare, à l’intention des audacieux qui imiteront leur entreprise…La maison construite par les « Artisans ». Source : site Web de l’émission http://www.rebutglobal.tv/cgi-bin/index.cgi?page=crg3_2
LE CONCOURS DU CANAL HISTORIA
Sauvez un bâtiment de chez vous. Un bâtiment ancien vous tient à cœur? Historia pourrait vous remettre 25 000 $ pour sa restauration. De retour pour une troisième édition, l’initiative «Sauvez un bâtiment de chez vous» d’Historia…
La maison : entre bien immobilier et lieu d’appartenance
Mais nos contemporains n’ont pas tous un rapport identitaire aussi profond à l’égard de leur lieu d’habitation. La maison est même devenue, pour une majorité d’entre eux, d’abord et avant tout un bien économique, un objet de spéculation. Ce qui a provoqué la crise financière de 2008 aux États-Unis. Dans certains quartiers bourgeois, la même maison est souvent mise en vente à tous les ans ou aux deux ans, au gré des changements professionnels (ou matrimoniaux) des occupants. Dans ces conditions, on n’a guère le temps de s’attacher aux lieux et c’est l’aspect fonctionnel de ceux-ci qui prédomine. (1) Fabrice Larceneux, « J’habite donc je suis ». Manuscrit auteur, publié dans Études foncières (2011), p. 23-26 - lien à venir) (2) Ève Duperray et Didier Alexandre, René Char dans le Miroir des Eaux, Beauchesne, 2008)
Démolitions
La démolition n’est pas une invention de la société de consommation. Au Moyen Age il arrivait qu'on détruise une belle église romane pour construire à sa place une église gothique plus conforme à l’esprit du temps. Pourtant aujourd’hui, au lieu de démolir maison et bâtiment, il serait, dans bien des cas, plus avantageux, du point de vue du développement durable, de les réutiliser. Le sens commun nous le dit, mais cela est maintenant confirmé par une étude récente du Preservation Green Lab (National Trust for Historic Preservation), intitulée : « The Environmental Value of Building Reuse ». Afin d’évaluer les différences entre une construction neuve et un bâtiment recyclé, les auteurs de l’étude se sont penchés sur des projets de nature différente, dans quatre secteurs géographiques des États-Unis (Chicago, Atlanta, Phoenix et Portland), et ils les ont comparés selon des indicateurs regroupés en quatre catégories : changement climatique, santé, qualité des écosystèmes et épuisement des ressources. « Les résultats en termes d’impact environnemental pour la construction ou la rénovation sont presque sans appel. Plus précisément, à l’exception de cas ou un entrepôt est converti en multi-logement (ce qui implique donc des modifications majeures et l’ajout de beaucoup de matériaux) qui présente des bénéfices négatifs pour certains indicateurs, tous les autres types de réutilisation sont avantageux. » (2)
La population en général est peut-être plus sensible aux atteintes faites au patrimoine naturel. Plus d’une manifestation a eu lieu, en effet, lorsque des promoteurs menaçaient de raser des boisés ou l’avaient malencontreusement fait. Le développement immobilier, l’extension de l’agriculture industrielle et l’étalement urbain menacent, on le sait, les derniers milieux naturels du sud du Québec (et même ailleurs dans la province). Il y a quelques années, un organisme de protection de l’environnement avait dressé la liste de certains de ces espaces parmi les plus menacés : Le boisé du Tremblay à Longueuil, la tourbière de St-Hubert, les boisés de La Prairie et de Boucherville, la forêt du Grand Coteau à Rosemère/Lorraine et celle de la rivière l’Anse à l’Orme, l’éco territoire des rapides du Cheval Blanc à Pierrefonds, les tourbières du Small et du Large Tea Field à St-Anicet, les boisés et milieux humides de l’Île Perrot, de Vaudreuil et d’Hudson, la Coulée verte du ruisseau de Montigny. Combien se sont ajoutés depuis? Combien, parmi ceux qui sont énumérés, font aujourd’hui l’objet de mesures de préservation? (1) Serge Latouche, Bon pour la casse. Les raisons de l’obsolescence programmée, Les liens qui libèrent, 2012, (2) Source : http://www.sagacite.org/2012/03/demolir-ou-reutiliser/, (3) Source : Radio-Canada, http://www.radio-canada.ca/regions/manitoba/2012/05/18/003-fin-programme...).
LE RITUEL DU DÉMÉNAGEMENT AU QUÉBEC
Déménage-t-on davantage qu’autrefois? Ce n’est pas sûr. Y a-t-il une incitation à la mobilité? Oui. Se déracine-t-on plus facilement qu’autrefois? Sans doute, comme on l’a vu plus haut.
Au Québec, le déménagement à date fixe fait partie des rituels collectifs. Il tire son origine de la Nouvelle-France, alors qu’un édit royal promulgué en 1750, enjoignait les gens à déménager certains jours particuliers. Jusqu’aux années 1970, c’est le 1er mai qui était la date prescrite pour les déménagements. « Afin de protéger les locataires contre des évictions hivernales, l’Église catholique aurait fait pression pour interdire les déménagements avant le mois de mai. » (1). Depuis la création de la Régie du logement, c’est le 1er juillet qui est la date des déménagements (on a choisi cette date afin de ne pas empiéter sur le calendrier scolaire). (2)
Il n’est pas exagéré de parler de rituel collectif, puisque, ce jour-là, bon an mal an, plus de 100 000 ménages québécois changent d’adresse. Le phénomène suscite même la curiosité à l’étranger, comme en font foi plusieurs reportages de médias européens ou américains.
À première vue, les déménagements ne favorisent pas ni l’enracinement, ni le sentiment d’appartenance; ils témoignent cependant de l’espoir que les gens ont de trouver le lieu qui leur convient vraiment. Le sort de ceux qui ne peuvent pas déménager est plus inquiétant.
Bon nombre de chômeurs, d’assistés sociaux, de travailleurs pauvres – tous des « mal-logés » – voudraient déménager mais ne peuvent le faire. Ils le voudraient, parce que leur logement est insalubre, ou trop petit, ou mal isolé, ou trop cher, ou trop bruyant. Ils le voudraient, mais ils ne le peuvent pas, parce qu’ils n’ont pas les moyens de défrayer le coût du déménagement, parce qu’ils ne trouvent plus de logement à prix raisonnable dans leur quartier, leur village ou leur ville. Ce sont, pour ainsi dire, des assignés à résidence. Comme cette jeune femme, entendue lors d’une audience de la Commission populaire itinérante sur le droit au logement du Front d'action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU), et qui y a raconté « (…) comment elle avait été coincée avec son jeune bébé et son père dans un logement rempli de champignons, sans argent pour déménager. ‘’Les gens pensaient que j’étais une mauvaise mère, mais je n’avais juste pas d’alternative. Je ne pouvais juste pas sortir de là?! Ils ont trouvé des champignons sur les poumons de mon père. Mon bébé est en attente de résultats. (1) Source : http://immigrer.com/faq/sujet/fete-du-demenagement-au-quebec-.html, (2) Source : http://www.radio-canada.ca/nouvelles/societe/2012/06/30/002-demenagement...(3) Cité par Mathieu Perreault, « Déménager pour améliorer sa carrière ou chômer », La Presse, 10juin 2012 http://affaires.lapresse.ca/economie/201206/10/01-4533420-demenager-pour...)
Les exilés économiques des quartiers et des régions
Un phénomène s’est intensifié depuis quelques années: la gentrification de certains quartiers de grandes villes et de certaines régions, en particulier les coins de villégiatures (Iles de la Madeleine, Gaspésie, Charlevoix).
Dans les grandes villes, des quartiers, autrefois populaires, ou avec une population variée, se transforment et sont habités désormais par une nouvelle classe sociale, plus aisée. Ce qui a pour conséquence de hausser le prix des maisons (et des loyers), tout en favorisant l’implantation de commerces haut de gamme. Les anciens habitants du quartier, moins bien nantis, qui y étaient souvent établis depuis plus d’une génération, n’ont plus les moyens d’y demeurer et sont repoussés vers d’autres coins de la ville. On peut mentionner ici le cas, très médiatisé, du Plateau Mont-Royal. Mais on évoquera aussi celui de Longueuil, moins connu mais tout aussi significatif. De « 2003 à 2009, 30?% de toutes les conversions de logements locatifs en condominiums du Québec ont eu lieu sur le territoire de Longueuil où il n’existe toujours pas de moratoire. ‘Les gens sont chassés de chez eux, déracinés’? » [dixit une intervenante en matière de logement] (….)» (1)
Dans certains hauts lieux de villégiature, comme les îles de la Madeleine, des acheteurs fortunés, originaires d’autres coins du Québec (comme Montréal et Québec) ou de l’étranger, acquièrent des maisons et en font leurs résidences secondaires. En conséquence, le prix moyen des propriétés, dans ces régions, augmente, et les habitants du lieu, qui voudraient y demeurer, n’ont souvent plus les moyens de le faire. « (…) le prix des terrains est aussi à la hausse. Au cours des 10 dernières années, les agents immobiliers ont fait énormément de prospection aux Îles. Un terrain qui valait 30 000 $ dans les années 1990 en vaut aujourd’hui 200 000 $. Beaucoup de Madelinots ont touché le gros lot en vendant leur terrain à des étrangers. Mais il s’agit d’une lame à double tranchant, puisque plusieurs personnes natives des Îles n’ont plus les moyens de mettre la main sur une propriété. Les jeunes, surtout. » (2)
Comme ces nouveaux résidents ne restent sur place que durant une période de quelques semaines, au plus quelques mois, le tissu socio-économique se modifie. En hiver, la population se fait de plus en plus rare, rendant la vie de ceux qui restent plus difficile.
À ces problèmes causée par la nouvelle « immigration » aisée, s’ajoutent les conséquences habituelles, sur le logement, de la demande touristique :
« (…) les insulaires (…) peinent à trouver un logement convenant à leurs besoins physiques et à leurs capacités financières. (…) certains propriétaires des Îles, soucieux de pouvoir louer aux touristes durant la période estivale très lucrative, limitent les locations de septembre à juin en offrant des baux temporaires. C’est donc dire que, durant l’été, des locataires doivent quitter leur logement. Mais pour aller où? ? Les lieux disponibles, surtout ceux à proximité des services, se font en effet extrêmement rares toute l’année durant. À ce chapitre, les effets négatifs du tourisme se font aussi sentir en Gaspésie (…). » (3)
Au bout du compte, une telle situation engendre souvent, chez les autochtones, un sentiment négatif à l’endroit des nouveaux-venus et des touristes, qui sont pourtant essentiels à l’économie de ces régions. Ils sont alors perçus comme des envahisseurs, qui viennent accaparer « leurs maisons » et « leur jobs ».
(1) Source : http://www.frapru.qc.ca/spip.php?article1052
(2) Source : http://urbania.ca/canaux/enquetes/1205/secrets-des-iles-de-la-madeleine
(3) Source : http://www.frapru.qc.ca/spip.php?article1063
Le sort des Algonquins tel que le décrit le cinéaste Richard Desjardins, dans Le peuple invisible
Dans Le Peuple invisible, Richard Desjardins et Robert Monderie s’indignent du traitement de la société blanche à l’endroit des Algonquins au cours des deux cents dernières années. Ils passent en revue, dans ce documentaire, les agissements de nos gouvernements, mais aussi ceux des citoyens habitant près des communautés amérindiennes, hier et aujourd’hui. Le film n’ignore cependant pas les problèmes qui tirent leur origine de la communauté algonquine elle-même, que ce soit la violence conjugale, l’inceste et les autres abus sexuels.
Le constat qui se dégage du film est affligeant. «Il n’y a pas beaucoup de positif dans l’histoire des Algonquins », avoue Desjardins à un journaliste. Ceux-ci, au nombre de 10 000 sont parmi les autochtones les plus pauvres du Canada. Au contraire d’autres nations amérindiennes comme les Cris, ils n’ont pas conclu d’ententes, qui auraient été bénéfiques pour eux sur le plan économique, avec le gouvernement québécois, comme la paix des Braves ou la Convention de la Baie-James.
Cette situation lamentable, qui s’explique par des causes complexes, n’est pas que le seul fait des Algonquins, comme en témoigne le récent mouvement de protestation « Idle No More ». Bien des communautés amérindiennes au Canada vivent dans un état de sous-développement et de misère extrême qui engendre des problèmes sociaux insolubles : pauvreté matérielle, infrastructures délabrées ou inexistantes, insalubrité, crise du logement, taux de suicide très élevé, chômage, violences sexuelles, déculturation, etc. Il est bien triste de devoir l’écrire : bien des communautés autochtones ne sont plus des communautés dignes de ce nom.
Le déplacement « forcé » de la main d’oeuvre
Pour le gouvernement canadien, les travailleurs ne seraient-ils que des pions qu’on peut déplacer sur un échiquier, au gré des besoins économiques de telle ou telle ville, de telle ou telle région ? C’est ce qu’on pourrait être amené à conclure de la réforme de l’assurance emploi entrée en vigueur en janvier 2013. Elle oblige, rappelons-le, les chômeurs à accepter un emploi dans un rayon d'une heure de leur domicile et même davantage dans certaines circonstances, sous peine de voir leur prestation supprimée. La réforme affectera tout particulièrement les travailleurs des secteurs du tourisme, des forêts, des pêches, dont l’activité est saisonnière. Dans le meilleur des cas, ceux-ci pourront trouver une autre occupation dans les environs de leur domicile. Lorsque cela ne sera pas possible, ils seront face à un dilemme : ou bien se déplacer pour un emploi qui offrira des conditions souvent moins intéressantes que celui qu’ils occupaient précédemment, ou bien décider de quitter, temporairement ou définitivement, leur région, afin d’améliorer leur sort. Ce que sont déjà forcés de faire bien des travailleurs de l’est du Canada, qui s’exilent dans l’Ouest canadien, à l’ombre des derricks…
Ce qui est inquiétant ici, c’est que, au dire de la ministre québécoise responsable du dossier, le gouvernement fédéral n’aurait pas fait d’études pour évaluer les impacts de sa réforme. On sent l’improvisation et le biais idéologique. Pour André Pratte, éditorialiste au quotidien montréalais La Presse, cette réforme n’est cependant pas déraisonnable et tout dépend, selon lui, de la manière dont on va l’appliquer. D’autres, notamment d’anciens candidats du parti Conservateur en région, y sont opposés vigoureusement. Pour l’un d’entre eux, Allen Cormier, qui est également préfet de la Haute-Gaspésie, cette réforme va tout simplement « vider la région ». C’est le message subliminal qu’envoie cette réforme : il n’y a plus d’avenir chez vous, « Young Man, Go West »... La suite logique de celle-ci sera-t-elle la suggestion faite, naguère, par un ancien PDG de la Banque nationale, à savoir de fermer, tout simplement, les régions économiquement non rentables?
(1) Source : http://www.frapru.qc.ca/spip.php?article1052,
(2) Eric Amieux, « Le logement, une (in)sécurité fondamentale », Ceras - revue Projet n°293, Juillet 2006 : http://www.ceras-projet.com/index.php?id=983
(3) Source : http://www.radio-canada.ca/nouvelles/societe/2009/07/01/002-1er-juillet-...
(4) Source : http://www.frapru.qc.ca/spip.php?article1011
Revue ESQUISSES
Pour une politique nationale d’architecture
Depuis le début de la Commission Charbonneau, une question brille par son absence. « On s’indigne des dépassements de coûts et du copinage, mais à aucun moment on ne s’est demandé si, comme société, on construit bien, à quelles fins, selon quels critères », remarque Marc Chevrier. Certes, ce n’est pas le mandat premier de la commission. Mais pour ce professeur en sciences politiques de l’Université du Québec à Montréal, c’est symptomatique.
Winston Churchill disait : « Nous façonnons nos bâtiments, puis ce sont eux qui nous façonnent. » François Dufaux, professeur à l’École d’architecture de l’Université Laval, abonde dans le même sens. « Beaucoup de gens voient l’architecture comme un fond de scène inerte. Or, elle structure nos vies. Elle rend certaines choses possibles et d’autres impossibles.
La maison de l’éthique, Éric Volant, Liber 2003
«Dans Les demi-civilisés de Jean-Charles Harvey, la grande maison à toit pointu du père Savard « ne respirait que propreté, vertu et tranquillité ». On se rend compte à quel point le mobilier et les habitants sont associés dans la vie et la mort, lorsque l'écrivain trouve dans le grenier de sa maison natale « tout un passé de ruines gisant comme les ossements exhumés des tombeaux anciens ». Un vieux rouet, une machine à coudre démontée, des boîtes à grains, des chaises bancales, des sommiers rouillés, chacun des objets portait «l'empreinte des mains qui l'avaient touché. Il [lui] semblait qu'une odeur âcre de corps au travail, cette odeur animale qui [lui] était familière», s'en exhalait. «Tous ces chers débris oubliés reprenaient vie, se réveillaient d'un long sommeil » et « toute la maison devint vivante ». P.63
Revue Liberté, No 226, La terre, Montréal 1996
«À partir de quel moment, et par quelle hybris de l’homme, le paysage s’est-il mis à rétrécir dans les tableaux des peintres et dans l’esprit de ceux qui les regardaient, je l’ignore.» Marie-André Lamontagne.
Guide de la maison verte, Michel Durand, Éditions La Presse, 2008
«Un constructeur m'a raconté sa visite chez des clients qui commençaient à soupçonner que quelque chose clochait du côté de la qualité de l'air intérieur de leur maison. En entrant, il s'est tout de suite rendu compte qu'il y avait effectivement un problème. Sa première vérification: le ventilateur récupérateur de chaleur. Il était éteint. Le filtre était neuf. Quelqu'un, quelque part avait omis de l'allumer lors de la mise en service. Il n'avait jamais fonctionné en plus d'un an d'occupation de la luxueuse demeure ! […] Une domotique trop poussée encourage une déresponsabilisation qui est contraire à toute la démarche prônée dans ce livre. Elle est peut-être aussi un symptôme, le signe que l'on n'a pas trouvé une réponse naturelle à la satisfaction des besoins.»
Le grand livre de l’érable, par Philippe Mollé, Trécarré, Montréal, 2013
Selon le même auteur, une cuisine nationale s’ébauche au Québec. En voici les principales composantes : les produits de l'érable, le cidre de glace ; les canneberges et autres petits fruits, comme le bleuet sauvage et la chicoutai ;le crabe des neiges ;le homard de la Gaspésie et des Iles ; le porc (des Viandes bio de Charlevoix ou de Gas-por);le mais sucré ; les fromages fins;les crevettes d'eau froide du Bas-du-Fleuve ; les pétoncles de la Minganie;la pomme du Québec ;l'agneau de Charlevoix;le bœuf des Cantons ;le cerf de Boileau;les vins des Cantons-de-l'Est.
L'Île-aux-Coudres et ses habitants sont indissolublement liés aux premiers documentaires du cinéaste Pierre Perrault. Pour la suite du monde (1964), Le Règne du jour (1966) et Les Voitures d'eau (1968) furent en effet tournés sur cette terre insulaire habitée par un peuple de géants, à la langue truculente et vivant en symbiose avec la nature environnante. Dans le premier film, qu’on peut sans exagération élever au rang de chef-d’œuvre, on est ému par la vérité de ces personnages taillés dans le roc qui, pour nous qui vivons en ce début de 21e siècle, nous semblent bien lointains mais aussi étrangement proches. Certains mots, certains gestes nous paraissent si familiers… C’est une société, un mode de vie traditionnels sur le point de disparaître qui défilent devant nous, pour la dernière fois…Le film a une réelle importance pour les habitants de l’île, si l’on en croit Mme Annie Harvey, la descendante d’un des acteurs : « Pour la suite du monde a été une énorme bouée pour les gens de l’île. On a fait connaître l’Isle-aux-Coudres par ce film-là. Je pense qu’il est encore plus précieux que Cartier lorsqu’il en a fait la découverte et ce n’est pas peu dire. Pierre Perreault avait le goût de reconstituer une pêche aux marsouins qui ne se faisaient plus depuis 50 ans à l’époque ». (1)
* Texte publié à l’occasion du 50e anniversaire du film (http://www.cihofm.com/archives/-/pub/P91z/content/1902001-un-festival-po...).
Les beaux plus villages du Québec
Afin de se rassasier de la beauté des villages pittoresques du Québec, on peut se rendre sur le site Web de l’Association des plus beaux villages du Québec. Cet organisme regroupe 35 villages dans 11 régions touristiques (http://www.beauxvillages.qc.ca/index.htm). Ces villages sont remarquables pour l’architecture des bâtiments qui s’y trouvent, de même que pour la beauté de la nature environnante, et surtout pour l’harmonie des rapports entre l’homme et la nature qu’ils manifestent.
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Le site Appartenance-Belonging explore notre désir, universel, d’appartenir. Il a pour objet les liens vivants qui nous unissent les uns aux autres, à nos familles, nos communautés, notre pays, nos croyances, notre terre, notre univers. À toutes les formes de vie. Appartenance-Belonging est né des liens d’amitié et de respect qui se sont formés entre trois organismes: L’Agora, L’Arche Canada et PLAN Institute for Caring Citizen.
Stéphane Stapinsky
Jacques Dufresne
2013-01-11 19:50
Encyclopédie de l’Agora
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