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Fondements et accommodements

Fondements et accommodements

Ce site, Le citoyen québécois, que nous lançons, la coïncidence nous paraît heureuse, au moment où le Québec politique s’engage dans un débat sur les valeurs, est un projet dont nous avons jeté les bases il y a vingt ans. Selon les occasions qui semblaient se prêter à sa réalisation, il s’est appelé tantôt Charte des obligations, tantôt Carnet ou Guide du citoyen. Nous l’appelons désormais Liste de principes. Il ne nous a pas été inspiré par le problème des accommodements (un accommodement est raisonnable par définition) sur lequel s’est penché la Commission Bouchard-Taylor et qui occupera une place centrale, qu'on le veuille ou non, dans le débat sur la Charte des valeurs annoncé par le gouvernement québécois. Il nous a été inspiré par l’état de la morale publique québécoise telle que nous l’ont révélée les commissions Gomery et Charbonneau et les grandes opérations policières en cours.

Ce sont les fondements plus que les accommodements qui nous intéressent. Nous ne pourrons toutefois pas rester indifférents aux liens entre les accommodements et les fondements. Si tel ou tel accommodement s’oppose à l’un de nos principes solidement établis, il nous faudra le dire, notamment dans les dossier Appartenance et Respect.

Voici un événement qui a eu lieu récemment dans une Caisse populaire de Ville Saint-Laurent. Une dizaine de clients, des femmes en majorité, font la ligne depuis un moment. Entre un iman. Il se dirige directement vers le guichet, avec l’intention manifeste de couper la ligne. Une femme âgée lui a d’abord indiqué poliment mais fermement, d’un mouvement de sa cane, d’aller se placer au bout de la file. Sans doute sous l’effet d’une nervosité qui montait, il a ensuite heurté l’une de femmes, qui lui a dit : «monsieur, ici la politesse est de rigueur.» Sur quoi, le dignitaire a quitté les lieux.

Dignitaire! Le principe en cause ici est le respect, est-il dû d’abord et exclusivement à la personne humaine comme telle. Auquel cas, il faut donner raison aux dames de St-Laurent. Est-il dû aux dignitaires plus qu'à la personne humaine comme telle? Si oui ne faudrait-il pas donner tort aux dames? Le respect en cause est-il un absolu, ou une chose qui fluctue, disparaît et reparaît d’un moment à l’autre et d’un lieu à l’autre, comme les nuages dans le ciel?

Respect à la personne en tant que personne. Ou respect au statut de cette personne. Vaste question.

S'agit-il vraiment du même respect dans les deux cas ? Les dames qui font la queue s'attendent à être traité décemment, correctement, par autrui. Tout simplement. Sans plus. Cet iman s'attendait visiblement à beaucoup plus, à une forme de déférence particulière à laquelle aurait été attachée certains privilèges. Dans un cas, pas de privilège. Dans l'autres, assurément.

Le fait qu'il s'attende à ce qu'on lui céde la place laisse entendre qu'il a une conception essentiellement hiérarchique, inégalitaire des rapports humains, en toute circonstance. Même dans celles qui ne mettent pas en jeu directement son statut, sa fonction, comme à la mosquée ou dans une cérémonie officielle, publique.. Nous sommes tout de même dans une société démocratique. Dans les échanges de la vie de tous les jours, il ne me semble pas que ce type de privilège devrait être invoqué. Par ailleurs, ne peut-on être respectueux envers quelqu'un sans lui concéder des privilèges. Oui, bien sûr. On peut saluer poliment, montrer par son attitude corporelle qu'on est sensible à la qualité particulière de telle ou telle fonction ou statut.

Je ne juge évidemment que d'après les éléments indiqués plus haut, mais je trouve qu'il y a, chez ce monsieur, une certaine petitesse. Même s'il estimait avoir droit à des égards particuliers parce qu'il est imam, il ne devrait pas montrer qu'il est offusqué qu'on ne lui rende pas lesdits égards. Le fait de ne pas retenir sa mauvaise humeur le rapetisse encore plus à mes yeux et fait que je le juge encore moins digne d'égards...

Prenons un autre exemple, différent, d'une personne qui a aussi un statut particulier. Un homme politique bien connu. Il y a bien longtemps, à Outremont, j'étais dans une épicerie, en ligne, et le chef de l'opposition officielle à Ottawa, Lucien Bouchard, prend place en arrière de moi, les gardes du corps à courte distance. Eh bien ! Comme on peut le penser, il a attendu patiemment son tour, sans jouer de son statut. Il aurait pu mettre de l'avant le fait qu'il aurait été pressé, que la limousine encombrait la rue, etc. Mais non. Dans cette circonstance de la vie quotidienne, il redevenait un être humain comme un autre. Ce qui ne m'a pas empêché de le saluer avec respect lorsqu'il est arrivé et ensuite lorsqu'il est parti.

Pour revenir à notre imam, quelques autres questions qui peuvent avoir des incidences sur la discussion  :

1) S'agit-il d'une immigrant ou d'un Québécois né ici? Dans le premier cas il n'est peut-être pas complètement au fait de nos moeurs en matière de politesse. Dans l'autre cas...

2) S'agit-il d'un homme jeune ? Si oui, on peut poser la question du respect envers les aînés, puisque la dame en question était d'un certain âge.

3) Est-ce que le fait qu'il s'agisse de femmes est important ici? Le souligne-t-on parce que l'on sait que cet aspect pose problème dans les versions les plus traditionalistes de l'islam ? Pour lui, est-ce que les femmes seraient moins dignes de respect, et cela expliquerait-il son attitude? Auquel cas, le problème de ce monsieur serait toute autre chose que le simple respect à des personnes, à des individus.

 

On peut construire la situation de différentes façons pour nuancer le jugement que l’on porte. Dès qu’on a dit « iman » ou « Lucien Bouchard », les émotions émergent, les raisonnements suivent. Et dans tous les jugements, les mots se bousculent pour exprimer des principes ou des valeurs : respect, statut, égalité homme femme, dignitaire, déférence, personne, dignité.

Je construis l’exemple à nouveau pour illustrer la société dont je rêve. J’entre dans cette Caisse populaire à la suite d’un iman (ou d’un Lucien Bouchard) qui vient se placer derrière deux dames qui attendent leur tour. Celle qui est immédiatement devant lui se retourne, s’incline avec respect et lui offre de passer devant elle. D’accord ou pas d’accord? Imaginons maintenant qu’elle demande aussi à l’autre dame devant elle de laisser passer l’iman. D’accord ou pas d’accord? Un autre client vient d’entrer et proteste devant cette manœuvre. D’accord ou pas d’accord?

Dans la société dont je rêve, chacun a le droit d’être ce qu’il est et mérite le respect, tout en étant soumis aux règles que la société se donne. Je respecte la dame qui donne sa place à l’iman (ou à Lucien Bouchard). Je respecte le choix du dignitaire d’accepter ou non. Je commence à hésiter lorsque la dame demande à sa voisine de faire comme elle en cédant sa place, mais je continue à respecter la décision de chacun présumant qu’il a la possibilité de faire un choix éclairé. Je ne suis pas d’accord si un observateur quelconque s’oppose à cette manœuvre. 

Chacun pourra se demander s’il rêve d’une telle société ou s’il préfère une société différente.

L'exemple de cet Iman à St-Laurent montre bien comment certaines "communautés" se sont ghettoisés. S'il n'y avait eu que des musulmans, l'Iman aurait passé sans mot dire. Je dis souvent à ceux qui reprochent le trop grand nombre d'immigrants à Montréal, qu'ils représentent les enfants que nous n'avons plus, les enfants non désirés qui ont été avortés.

Voilà pourquoi je traite toujours l'immigrant avec respect et égards puisqu'à mes yeux ils sont nos enfants sacrifiés. Je ne suis pas très chaud à l'idée de la charte des valeurs puisqu'au lieu d'écrire et d'édicter, nous ferions bien mieux de simplement et généreusement peupler le pays comme nous avons toujours su le faire....jusqu'à il y a 50 ans.